Concevoir un site comme celui-ci avec WordPress.com
Commencer

Les noix la mouche le citron : recueil de nouvelles de l’ère Taishô

Les onze nouvelles présentées dans ce recueil que les éditions Picquier ont l’a bonne idée de publier à nouveau et en format poche ont été écrites entre 1910 et 1926, soit à peu près pendant l’ère Taishô (1912-1926), première époque de maturité du roman japonais moderne.

L’introduction permet de comprendre cette période cruciale. Si certains arts pouvaient souffrir à cette époque d’un clivage traditionalistes/modernes, ce n’est pas le cas de la prose qui parvient à éviter ce scindement. Elle offre un mélange d’influences occidentales, de réalité japonaise avec un côté traditionnel, mais surtout elle dépeint un monde effervescent entre enseignements séculaires, exigences de la modernisation, idéaux de la voie du guerrier et même conceptions bouddhiques. L’écrivain peine à y trouver sa place, « se débat dans un réseau familial qu’il ne supporte plus, dans une société d’affairistes et de bureaucrates, sous un régime autoritaire toujours prêt à le censurer ».

Le recueil de nouvelles permet de découvrir toutes les facettes de ce monde en mouvement, avec entre autres courants le naturalisme japonais et le shi-shôsetsu (roman à la première personne dans lequel l’auteur évoque sa vie, ses problèmes, un peu comme une confession).

Le format de la nouvelle est une des formes favorites des écrivains japonais et tous les grands noms de la littérature de cette époque s’y sont adonnés. Vous retrouverez ainsi Nagai Kafû, Edogawa Ranpo, Akutagawa Ryûnosuke et Tanizaki Jun.ichirô entre autres !

Le choix des nouvelles est très intéressant et chacun trouvera son bonheur : fantastique, historique, autobiographique, naturaliste … de quoi éveiller la curiosité pour certains auteurs, admirer l’imagination d’autres … et passer un bon moment de lecture !

De l’histoire de la mouche du coche de Yokomitsu Riichi à un homme passionné jusqu’à la folie par les miroirs de Edogawa Ranpo, en passant par les feux d’artifice qui font renaître les souvenirs de Nagai Kafû ou l’histoire terriblement banale d’une jeune fille qui se prostitue pour survivre de Hayama Yoshiki … les univers et les styles de chacun de ces écrivains éveillent tout un tas de sentiments différents et donnent envie de se plonger encore plus dans la lecture de ces écrivains du début du XXème siècle.

La description d’une femme dans une pâtisserie par Izumi Kyôka :
 » Sa taille élancée semblait d’autant plus svelte qu’elle avait soigneusement arrangé son kimono; Le haori et le kimono étaient en soie d’Oshima, à petits carreaux sombres. La cordelette du haori, nouée assez serré, dissimulait délicatement la rondeur de ses seins … L’encolure dessinait une ligne très pure. La fente des manche, tournée vers l’intérieur comme dans le costume des poupées, laissait à peine entrevoir le rouge vif du sous-kimono. Le col neuf, sans doute en mousseline de laine, à motifs de fleurs sur fond mauve, croisait très haut, ce qui lui donnait ce port fragile et même mélancolique, particulier aux femmes nées dans les neiges. »

La beauté de la rivière (où un homme attend une femme qui ne vient pas) par Akutagawa Ryûnosuke :
« Dans le lit de la rivière, des roseaux verts se serraient en une masse impénétrable. Et, trouant cette masse, des saules arrondissaient çà et là leur épaisse chevelure. Aussi, les eaux qui s’y faufilaient paraissaient-elles perdues au milieu du lit de la rivière. Seul un ruban d’eau limpide recueillait le reflet micacé d’un nuage solitaire, serpentait sans bruit entre les roseaux. Mais la femme ne vient toujours pas. »

Il faut souligner les excellentes traductions du groupe de traducteurs Kirin constitué à l’Université de Jussieu Paris VII qui a permis la naissance de cette anthologie parue en 1986, année de la création de la maison d’édition.

Publicité

Dan-Sha-Ri l’art du rangement d’Hideko Yamashita : prendre conscience, retrouver sa place dans son espace

Peut-être parce que j’ai dû mettre 18 ans de vie dans mon ancienne maison dans quelques cartons et des dons à des amis, j’ai lu beaucoup de livres différents sur le rangement, sa magie avec la méthode de Marie Kondo, le minimalisme avec Fumio Sasaki. Celui-ci est encore différent et est peut-être celui qui m’a le plus parlé en terme de prise de conscience de l’encombrement, de l’accumulation, de la difficulté à se débarrasser des objets. Parfois le livre s’envole un peu trop côté spiritualité, mais globalement il permet d’expliquer où ça bloque, pourquoi ça bloque et comment faire pour amorcer le changement. Et les exemples distillés au fil des pages sont très marquants et instructifs. Il y est plus question de psychologie, de vivre au présent, de remettre au centre le moi qui utilise l’objet et non pas l’objet qui s’installe chez nous et prend de plus en plus de place sans nous apporter utilité et plaisir. Donc ne vous attendez pas à un livre pratique sur le rangement, même si il y a quelques astuces en fin de livre, mais plutôt à une réflexion sur notre rapport à nos objets, lié à notre façon de penser et d’être.

Dan-Sha-Ri signifie refuser, jeter, se détacher. Et l’image d’une maison constipée qu’utilise Hideko est très parlante : on accumule, on n’enlève rien, on rajoute rajoute jusqu’à ce qu’on ne puisse plus circuler, vivre harmonieusement dans la maison. Et si un laxatif (vider) peut s’avérer efficace temporairement, le but est de ne pas avoir à en prendre régulièrement, mais bien de changer notre alimentation … en résumé, réduire le nombre d’objets.

Je tiens d’ailleurs à souligner qu’en plus d’images très parlantes, Hideko illustre son propos de nombreux schémas très bien faits qui synthétisent ses mots de façon claire et très visuelle.

Pour procéder à cette réduction du nombre d’ojets, il faut se replacer au centre de la maison, moi qui utilise l’objet (et non pas l’utilisabilité de l’objet en général, un objet que d’autres utilisent avec bonheur pouvant ne pas nous être utile du tout). Cela permet de se redécouvrir, de s’affirmer, de trouver ce qui nous convient, nous est utile ou inutile, plaisant ou gênant. Et petit à petit, le QI des vieilleries augmentera lorsque nous trierons jour après jour.

L’objet est le reflet de l’image qu’on a de soi-même. Il faut donc ne garder que nos favoris, les meilleurs pour nous, et même si possible utiliser des objets supérieurs à l’image que l’on a de soi (vu que la tendance est souvent à se déprécier). Et cela tout en régulant la quantité totale d’objets dans la maison.

Concernant la méthode (qui n’est qu’une toute petite partie du livre, pour des choses plus concrètes sur la façon de ranger, voyez Marie Kondo !), un conseil que j’ai apprécié, c’est de ranger en fonction du temps qui est disponible (contrairement à Marie Kondo qui demande de trier toute la maison par catégories d’objets, et de s’y mettre sur une durée pas toujours évidente à libérer). Par exemple, il est possible de trier un tiroir si vous avez 15 minutes devant vous. D’ailleurs le passage sur le tiroir vous parlera probablement (en ce qui me concerne, c’est le premier endroit que j’ai trié quand j’ai commencé mes cartons de déménagement, des années qu’il était rempli de toutes sortes de petites choses) :
« Afin de savourer immédiatement les changements qui interviendront dans votre conscience, privilégiez les lieux qui agiront sur votre psychologie profonde. Cela peut être un endroit facile à trier, mais que vous avez laissé à l’abandon durant de longues années, sans vraiment savoir pourquoi. Personne n’y prête attention, mais vous, vous vous en souciez. Comme ce tiroir que vous continuez d’utiliser alors que quelque chose « coince » lorsque vous l’ouvrez. Tant pis ! vous dites-vous. Tant qu’il continue de s’ouvrir, ce n’est pas important, pensez-vous. Et vous l’abandonnez. Ces petits détails émergent de temps à autre dans votre esprit. Ils vous préoccupent. Reporter constamment le moment où vous vous en occuperez favorise la fuite d’énergie ».

Toujours penser en fonction de Vous qui êtes le sujet, comme l’explique l’exemple du réfrigérateur :
 » Les personnes peu douées en rangement ont généralement des difficultés à créer des catégories. Débuter par des endroits qui ne nécessitent pas de classification permet de ne pas ajouter de stress supplémentaire. Par exemple, le réfrigérateur ou encore le meuble à chaussures (même s’il arrive que chez certains, ils contiennent des éléments étrangers à leur fonction d’origine …). Ces lieux sont idéals pour s’entraîner au tri, à la sélection et à la catégorisation en fonction de vous qui êtes le sujet. Est-ce que je le mange ou non ? Est-ce que c’est bon pour moi ou non ? Vous devrez simplement mettre de côté les aliments que vous avez envie de manger et qui sont bons pour vous. Les indésirables vous sauteront immédiatement aux yeux ».

Quelques astuces sont livrées pour le rangement : ne pas trop remplir (70% de taux de remplissage pour les meubles de rangements cachés, 50% pour les rangements visibles type buffet, desserte, et même 10% pour les rangements destinés à être exhibés, pour montrer la beauté des objets). Le but étant de faciliter la circulation des objets (ne pas avoir à enlever des choses pour accéder aux objets du fond). Faciliter les mouvements avec si possible un geste unique pour prendre l’objet (enlever les couvercles des rangements, utiliser une pince plutôt qu’un élastique). Ordonner par variété (verres ronds, verres carrés, verres en plastique par exemple). Mettre les objets debout (et dans un contenant quand c’est possible, cela permet en même temps d’en limiter la quantité). S’ils ne tiennent pas debout, les rouler pour les mettre debout.

Un livre qui permet de poser un bon diagnostic de votre maison, mais surtout de votre ressenti, de vos barrières mentales … un livre pas du tout moralisateur mais qui met le doigt et des mots sur ce que vous deviniez un peu si vous vous posez la question de l’encombrement, du tri, du rangement et que vous avez déjà feuilleté des livres sur le sujet … Un premier pas pour une nouvelle façon de penser et d’être !

J’avais 6 ans à Hiroshima de Keiji Nakazawa : souvenirs terribles d’un enfant face à la bombe atomique

Chaque été, le triste anniversaire de la bombe atomique d’Hiroshima approchant, je me replonge dans les témoignages de rescapés, de journalistes, d’écrivains, pour tenter d’approcher l’inimaginable, l’impensable, l’horreur absolue.

Pour savoir et pour ne pas oublier, pour transmettre à ma petite échelle les mots bruts, durs, terrifiants pour décrire la bombe, l’explosion, les cadavres, les blessés qui agonisent en demandant de l’eau, les irradiés qui souffrent des années après l’explosion, les rivières qui charrient des corps, la pluie noire radioactive.

Tout cela doit être dit, doit être lu, doit être su.

Ce livre qui vient d’être réédité aux éditions du Cherche midi est particulièrement saisissant car il est rempli des souvenirs atroces d’un petit garçon de six ans, Keiji Nakazawa. Ce nom vous dira peut-être quelque chose. C’est en effet le mangaka de la série Gen d’Hiroshima, qui a mis en dessins toute l’horreur qu’il a vécue le 6 août 1945 et les années qui ont suivi. Cette fois-ci ce sont les mots simples, crus, nus, qui permettent de dire les sensations, les visions de ce petit bonhomme marqué à vie par ce qu’il a vécu ce jour-là.

Les souvenirs s’ébauchent dès la fin de l’année 1944 : le combat quotidien contre la famine, les rêves de riz blanc, le poisson volé au chat … et malgré toutes les difficultés, la vie qui s’installe dans le ventre de sa mère.

Ce matin du 6 août 1945, le petit garçon s’apprête à partir à l’école et parle à la voisine près d’un mur épais … Un flash, sa voisine totalement carbonisée, lui sauvé par le mur. Et tout de suite après, les visions d’horreur partout : les maisons effondrées, les humains en haillons criblés de morceaux de verre ou brûlés. « Tous se déplacent machinalement, sans bruit, sans un cri de douleur. Ils me font penser à des larves d’insectes. Quand l’horreur franchit les limites de tout raisonnement possible, dépasse l’entendement humain, je me demande si les gens ne deviennent pas insensibles à la douleur. N’est-ce pas déjà l’au-delà ? »

Il retrouve sa mère, un bébé dans les bras, né en ce triste jour. Mais son père et son frère sont morts brûlés, coincés sous les décombres, sans pouvoir être sauvés par leur mère que les voisins ont éloignée du brasier et des cris alors qu’elle voulait mourir avec eux. Sa petite soeur est morte également, mais a priori sans avoir eu le temps de hurler … Les cris du mari et du fils hanteront toute sa vie la mère de l’auteur.

Après la pluie noire, le soleil se fait de plomb et les cadavres entrent en putréfaction dans les champrs, les larves et les mouches s’installent dans les plaies des blessés. Autant de visions que l’auteur nous livre avec des détails qui montrent que tout s’est imprimé dans son corps, par tous ses sens : « Nous enjambons souvent des cadavres. Nous marchons parfois sur un morceau de chair qui glisse tel un fruit blet. De la peau humaine colle à nos pieds. Nous l’enlevons. »

Puis ils retrouvent un grand frère, croisent un oncle qui meurt mystérieusement après avoir sauvé des gens en ville. On découvre l’effet des radiations de la bombe. Difficile de trouver à manger, de trouver un lieu où dormir. Sans oublier un typhon qui s’abat sur la ville.

Et les visions d’horreur qui se poursuivent : les os blancs charriés par les rivières ou recouverts de terre et compactés au rouleau compresseur sous le regard indifférent des soldats américains, la mort qui rôde toujours et emporte le bébé.

Et puis il y a l’ABCC (Atomic Bomb Casuality Commission) qui trie et examine les élèves des écoles, nus devant tout le monde, et qui pratique des prélèvements sur les cadavres … des « nécrophages qui n’ont jamais soigné ni aidé une population meurtrie qu’ils transformaient de surcoît et sans explication en cobaye. »

Le récit s’achève par l’année 1967 : la naissance de la fille de l’auteur, mais aussi malheureusement l’essai nucléaire chinois.

Le texte de Keiji Nakazawa est précédé d’une préface de Paul Quilès, président d’IDN (initiatives pour le désarmement nucléaire), illustré par de nombreuses photographies (ville détruite, blessés, hôpitaux, ABCC, manifestations), suivi d’un texte engagé de Bernard Clavel, écrit en 1995 pour la première édition du livre, La Peur et la Honte, et enfin accompagné d’annexes qui apportent de précieux élémens de compréhension. Un ensemble qui permet d’aborder ce sinistre événement de la façon la plus complète possible.

Un livre à mettre entre toutes les mains, à diffuser partout !

Le récital de piano d’Akiko Miyakoshi : gérer son trac de pianiste !

Voici un livre tout doux et adorable qui évoque un sujet qui m’a particulièrement touchée : le trac lors d’un récital de piano. Avoir le coeur qui palpite, les mains moites, peur de faire des fausses notes … je ne compte pas le nombre de fois où j’ai connu cela enfant au conservatoire. J’adorais jouer (et j’adore toujours) du piano, mais les examens et autres concerts me stressaient beaucoup. J’ai donc trouvé cette histoire intéressante pour essayer de dédramatiser ce type d’événement.

Une petite fille attend son tour pour monter sur scène et jouer son morceau au piano. Elle se répète sans cesse « ça va aller ». Et soudain, une petite voix au ras du sol dit la même chose. C’est une petite souris qui a elle aussi mis sa belle robe pour un récital. Elle invite la petite Momoko à venir voir le spectacle des souris.

En passant par une porte minuscule, elles arrivent dans une salle remplie de petits fauteuils sur lesquels sont assis des rongeurs. Lorsque le spectacle commence, la petite fille est émerveillée par les numéros de cirque, par une danseuse qui se transforme en papillon, par une cantatrice qui entraîne une foule de souris à chanter et danser, même si ce n’est pas en rythme. Une ballerine aux petites pattes et petits bras prend la pose d’un air assuré puis s’envole grâce à une corde pour atterrir sur la robe de Momoko ravie !

C’est maintenant à la petite souris angoissée de chanter … la petite fille la rassure et lui dit qu’elle va l’accompagner au piano. Tout le monde se joint au duo. C’est alors que Momoko réalise qu’elle est sur scène, assise à son piano. Les applaudissements pleuvent dès qu’elle achève son morceau. Sa mère lui dira plus tard qu’elle avait un beau sourire lorsqu’elle jouait.

Le texte peut sembler un peu plat, il est très descriptif mais pas très poétique, la poésie et la magie se trouvant davantage dans les dessins crayonnés que j’aime beaucoup. Je trouve en général que le crayon permet de travailler très finement sur l’ombre et la lumière, ce qui est particulièrement flagrant dans ce livre. L’ensemble est globalement très gris et pourrait paraître sombre, mais les touches de couleur des vêtements, de certains éléments des décors et la lumière posée sur les artistes donnent une impression de douceur, de rêverie et de magie. C’est un univers merveilleux, un monde parallèle où tout le monde chante, danse, rit. Comme une parenthèse enchantée qui permet d’appréhender la vie avec beaucoup plus de légèreté ! De quoi rassurer et allèger le coeur des enfants anxieux !

Un très beau livre à mettre entre les mains de tous les enfants qui ont peur avant les spectacles, les prises de parole en public, les grands événements. Des événements qui font certes grandir et laissent de bons souvenirs, mais peuvent terroriser sur le moment. Et puis, ces petites souris sont tellement craquantes !

Deux beaux albums jeunesse aux éditions HongFei

Les éditions HongFei proposent de très beaux livres jeunesse autour du Japon. Ils viennent de publier L’amie en bois d’érable de Delphine Roux et Pascale Moteki dont j’ai parlé dans Journal du Japon. J’ai donc eu envie de parler ici de deux autres titres que j’ai beaucoup aimés : Le samouraï et les 3 mouches et Le secret du clan.

Le samouraï et les 3 mouches ou comment l’intelligence se joue de la force

Voici un livre réjouissant pour les enfants à partir de 6/7 ans. Des textes courts façon haïku et des images simples mais très expressives, avec des tons chauds jaunes et orangés et des traits noirs épais, comme faits au pinceau de calligraphe.

Le personnage principal est un samouraï qui arrive à cheval dans un village, à « l’heure des ombres suspectes des soupes sur le feu ». Après avoir attaché son cheval, il s’installe dans une auberge face à trois ronins. Tour à tour, ils viennent le provoquer, mais il reste de marbre. Mais quand trois mouches tournoient un peu trop près de son bol, il les étripe en quelques coups de baguettes.

Les trois ronins pris de panique s’enfuient (en se bousculant pour passer les shôji (parois coulissantes typiquement japonaises). Le lecteur les voit ensuite sous forme d’ombres chevauchant leurs montures dans un « cataclop clop clop » qui fera rire les jeunes lecteurs. Après leur départ, le samouraï commande un thé puis reprend son cheval et chemine seul façon Lucky Luke.

Un livre qui mêle action (le lecteur se demande comment va réagir le samouraï face aux provocations des rônins qui menacent du poing, offensent, insultent) et réflexion (ne pas répondre à la provocation mais montrer tranquillement sa force sans blesser personne … sauf des mouches).

Des textes courts qui font mouche et des illustrations qui pétillent !

Le secret du clan : secret partagé entre un grand-père et sa petite fille

J’ai été très touchée par ce livre aux peintures délicates, laissant les contours des objets et des personnages légèrement blancs, comme si une lumière mystérieuse se dégageait de tout.

Car c’est bien à un mystère qu’est confrontée la petite fille qui vient, comme chaque été, passer ses vacances chez son grand-père chéri dans un petit village sur une île, au milieu des poissons, des nuages et des esprits : pourquoi grand-père a-t-il un petit crabe tatoué sur son avant-bras, tout comme le boulanger et le poissonnier … et pourquoi d’autres habitants (le professeur, les policiers, l’épicier) ne l’ont pas ?

La fillette partage des moments précieux avec son grand-père, comme la fête des âmes lors de laquelle on fait voguer des lanternes sur l’eau pour les défunts. C’est ce qu’ils font à deux, silencieusement, tenant la lanterne à quatre mains pour grand-mère.

Alors que la lanterne s’éloigne, la petite fille pose son doigt sur le tatouage du grand-père qu’elle regarde fixement « avec des points d’interrogation plein les yeux ». Il lui sourit sans dire un mot, mais quelques heures plus tard, il la réveille alors qu’il fait encore nuit pour lui montrer quelque chose. Avec d’autres tatoués, ils assistent à un phénomène exceptionnel. Quelque chose qui doit rester secret … Je ne vous en dirai pas plus pour vous laisser découvrir l’ambiance magique de la découverte !

Le texte est à la fois descriptif et poétique, plein de douceur et de magie. Il raconte le silence et l’amour avec beaucoup de tendresse et de chaleur, accompagné par les traits minimalistes des illustration : des mains qui se touchent, des personnes qui s’inclinent, des silhouettes de montagnes qui se dessinent sur la mer, un bateau qui fend l’onde, un nuage qui moutonne …

Ce livre très émouvant permet d’aborder de nombreux sujets avec les enfants à partir de 6 ans : l’enfance, la famille, la tranmsission, le secret, et le respect de la nature entre autres.

Un livre qui émerveille !

Kiki la petite sorcière : le roman du film, dépaysement, magie, poésie !

En ces temps de confinement et parfois de stress, d’angoisse, je vous invite à découvrir les deux volumes des histoires de Kiki la petite sorcière. Si vous avez aimé le film de Miyazaki, vous adorerez le roman d’Eiko Kadono qui l’a inspiré. Les éditions Ynnis publient ses aventures en deux volumes. J’avais écrit sur le premier tome dans Journal du Japon, et je vous donne donc ici mes impressions sur le deuxième.

C’est un bonheur renouvelé de suivre les aventures de la petite sorcière qui, dans ce deuxième volume, revient dans sa ville adorée après un séjour chez ses parents. Elle se rend compte qu’elle aime profondément cette ville, et avec son chat Jiji, elle continue ses services de livraison.

Des aventures toutes plus magiques les unes que les autres se succèdent. Voyez plutôt : transporter un hippopotame malade chez le vétérinaire (par les airs !) car un lion a mangé sa queue, apporter un sac de magicien au théâtre et voir des animaux en sortir, découvrir les chants d’arbres dans la montagne, livrer une pomme à la soeur de l’horloger de la ville, ou une enveloppe noire à deux demoiselles.

Chaque chapitre emmène le lecteur dans un coin de la ville ou beaucoup plus loin, dans la forêt, la montagne, et même sur une île d’un superbe archipel où un « découvreur » est parti étudier les chantereux, des cousins du paresseux qui chantent en groupe !

Kiki est toujours serviable et de bonne humeur, même si parfois les clients sont désagréables, autoritaires ou grognons … Ils ont souvent des problèmes que la sorcière finit par comprendre et même résoudre. Ce sont des humains avec leurs soucis, leurs humeurs, leurs faiblesses et leurs incompréhensions. Avec son regard et son coeur de jeune fille qui devient adulte, malgré la fatigue, les interrogations, les doutes, elle rend heureux ceux qui la côtoient.

Et c’est bien ce qui caractérise ce deuxième volume : une petite sorcière qui grandit, réfléchit à ce qu’elle veut faire de sa vie, se demande si ses livraisons sont bienveillantes ou si parfois elle ne transporte pas de mauvaises choses. Elle commmence également à ressentir des choses étranges au fond de son coeur quand Tombo lui parle, lui écrit, ou partage de bons moments avec une autre jeune fille.

Elle repense parfois à son enfance et c’est un bonheur de s’y plonger avec elle : « Je rentraits à quatre pattes dans les herbes hautes. J’avais l’impression de me glisser sous une couverture qui sentait bon. Je m’allongeais sur le dos et je fermais les yeux très fort. Des pois aux couleurs de l’arc-en-ciel brillaient et bougeaient sous mes paupières, c’était rigolo. C’étais comme si j’avais le ciel dans mes yeux. Un jour, j’ai entendu des éternuements, loin sous la terre. Ça ne s’arrêtait plus ! Ma mère est réputée pour ses remèdes contre les éternuements, alors j’en ai pris un et je l’ai posé à l’endroit où je les avais entendus. Quand j’y suis retournée un peu plus tard, le médicament avait disparu et cette fois, j’ai entedu un petit bruit, comme un tapotement. « Toc toc ! ». J’ai pensé que c’était une taupe. Et par la suite, j’ai pris l’habitude de discuter avec elle. »

Un petit grain de magie que le lecteur retrouve avec bonheur tout au long de la lecture !

Kiki devient donc plus mature au fil des expériences, des échanges, que ce soit avec un vieux monsieur qui lui demande de se promener avec sa canne alors qu’il est mourant à l’hôpital, ou avec une jeune fille qui vit dans la forêt et fait des merveilles de coutures et de broderies avec ses mains.

« Une fois entrée, Kiki poussa un cri d’admiration. L’intérieur de la maison était complètement différent du paysage extérieur couleur feuille morte. On se serait cru dans un champ au printemps. Des papillons et des coccinelles en tissu étaient accrochés aux rideaux bleu ciel. Des coussins vert trèfle étaient disposés sur le tapis vert clair. La table basse était blanche, comme un nuage tombé du ciel. Des broderies de fleurs multicolores ornaient la nappe et les serviettes. Dans un panier posé sur la table reposaient des petits pains encore fumants. »

Une description féérique !

Et elle, que veut-elle fabriquer, créer ? Elle avancera au fil des pages vers sa véritable vocation, accompagnée par l’adorable boulangère Osono et par sa mère (par lettre ou en allant la voir).

Les textes sont toujours très poétiques, les images qui défilent sont éblouissantes et le lecteur peut vraiment s’évader d’un quotidien parfois morose pour vivre des aventures magiques. Et à tout âge on se réjouit d’accompagner Kiki sur son balai ou à pied dans les ruelles … et de voir le chat Jiji grandir lui aussi, et s’intéresser à la belle chatte Bechi !

Un univers tendre, doux, dans la belle lumière du soleil qui inonde la ville, entre la mer étincelante et la montagne verdoyante.

Un livre qui fait vraiment du bien à tout âge !

L’art de mettre les choses à leur place (une vie meilleure dans un espace ordonné) de Dominique Loreau : clair et efficace

Je poursuis ma lecture des livres de Dominique Loreau avec celui-ci, qui pourrait s’apparenter à celui de Marie Kondo. Il y a beaucoup de points communs, mais peut-être que celui de Dominique est plus adapté à la pensée occidentale, moins rigide, avec des astuces qui nous parlent davantage.

D’abord une partie théorique pour comprendre pourquoi ranger ? « Le but premier du rangement est de replacer les choses de façon à pouvoir, à l’utilisation suivante, trouver immédiatement, même les yeux fermés, n’importe quoi. Lorsque l’on place toujours ses clés au même endroit, on est sûr, le lendemain, de les retrouver. Ranger, c’est donc s’éviter de toujours avoir à chercher, de perdre les choses ou de ne pas les trouver là où on pensait les avoir mises. Pour s’éviter mille petites causes de stress de chaque minute … pendant toute une vie. Ranger, c’est gagner du temps, pour soi et pour les autres ». C’est économiser de l’énergie, se sentir bien. Posséder peu de choses bien rangées, c’est très utile en cas de problème, de catastrophe. C’est respecter les autres et soi-même. C’est avoir un havre de paix face au désordre du monde. C’est très utile contre la démence sénile. Et cela permet d’apprendre à se connaître, à découvrir ses passions … et d’utiliser chaque objet avec contentement, plaisir.

Mais comment classer ? Avec les facteurs suivants :
– la fréquence ou la rareté d’utilisation (rôle du temps)
– la netteté de la vision (rôle de l’oeil)
– la facilité de préhension (rôle de la main)
– l’endroit le plus proche de là où l’objet va être utilisé (loi de « proximité »)
– le choix de l’espace choisi pour le ranger (juste rapport entre la taille d’un objet et celle de son contenant)

Pour le tri, on retrouve les éléments expliqués par Marie Kondo : désencombrer (moins on possède et mieux on peut ranger), visualiser son intérieur rêvé, prendre le temps et ranger seul, jeter (si on hésite, c’est que ce n’est pas utile), ranger par catégorie (vêtements/tissus, livres et documents, vaisselle/ustensiles/nourriture, petites choses comme papeterie, DVD, bricolage, médicaments, bijoux, sacs, chaussures, et enfin souvenirs et objets sentimentaux) et non par pièce (mettre tous les objets d’une catégorie sur un grand tapis).

Le livre détaille ensuite par catégorie comment procéder.

Pour les vêtements, on les classe par catégorie et ne garde que ceux qu’on aime (et on remercie puis donne ou jette les autres), pour le linge de maison, deux parures par personne de la maison et pour les couchages invités.

Pour les livres et documents, on met tout à terre et on examine un par un les objets à ranger ensuite par catégorie. On prend des cartons à dessin pour les gros documents (type radio et autres documents grand format), et un classeur robuste pour les factures en cours et les adresses à avoir sous la main.

En cuisine, on limite le nombre d’ustensiles, on les met dans des casiers adaptés. Les choses les moins utiles sont placées en hauteur.

Pour les autres objets, une boîte par fonction ou loisir créatif.

Une partie intéressante est consacrée aux éléments de rangement : quand et comment utiliser les casiers, les boîtes, bocaux, bouteilles, tiroirs compartimentés, crochets, patères, tringles, étagères et placards. Concret et utile !

Une grande partie explique la loi des mouvements et la loi de la proximité. Optimiser le rapport geste/objet (ergonomie) est possible en adaptant le rangement aux hauteurs, profondeurs, fréquences d’utilisation, tailles et volumes des objets. Un truc évident est de ranger les objets au plus près de leur lieu d’utilisation ! Des astuces sont données pour chaque pièce de la maison, et parfois on se dit « mais bien sûr ! ».

Ce livre est très agréable à lire, avec de nombreux conseils précieux et très concrets. Il regorge aussi de références au Japon, à la façon de penser et de ranger des Japonais, de mots japonais qui arrivent à concentrer tout un concept ! Plaisir et utilité combinés : le livre idéal pour le confinement !

Aimer la pluie, aimer la vie de Dominique Loreau : lecture idéale par temps de confinement !

Après une absence un peu longue sur le blog (mais j’étais plus active sur Journal du Japon, n’hésitez pas à aller jeter un oeil pour lire mes derniers articles), me revoilà avec un article de circonstance : apprendre à aimer la pluie, à rester de longues heures à la contempler, à la sentir, à la respirer … Une lecture idéale en ces temps de confinement !

Pourquoi Dominique Loreau dans un blog sur le Japon et sa littérature ? Parce qu’elle est profondément japonaise : elle vit dans ce pays depuis une quarantaine d’années, elle s’est véritablement imprégnée de sa culture, de ses paysages, de ses écrivains. Sa façon de ressentir le monde et de le mettre en mots est profondément japonaise. Ses nombreux ouvrages le montre : L’art de la simplicité, L’art de la délicatesse, L’art de l’essentiel, L’art de la frugalité et de la volupté, L’infiniment peu, Vivre heureux dans un petit espace, L’héritage du temps, L’art de mettre les choses à leur place … On pourrait penser à des livres écrits par des moines bouddhistes japonais !

J’ai choisi de vous parler de celui-ci car il est très apaisant pour ceux qui sont confinés chez eux et sont en quête de belles lectures. Vous aurez de quoi picorer des citations, des haïkus, des extraits de textes qui vous raviront et vous rendront plus calme, plus contemplatif. Certains trouveront peut-être que cet ouvrage n’est qu’une succession de réflexions et de beaucoup trop de textes d’écrivains asiatiques et occidentaux. Mais c’est un mélange que je trouve harmonieux et délicat, qui fait rêver, voyager, méditer.

La pluie est d’abord abordée par les cinq sens :

  • visuellement avec les tableaux de pluie (qui redonne des couleurs aux choses, qui offre des dégradés de gris, des lavis, des brumes, des bruines ou des crachins, des nuages merveilleux, des lumières uniques, des géométries et des graphismes organiques)
  • à l’oreille, la pluie offre des mélodies célestes, des silences également, et au Japon, on la parle en onomatopées : « Quand les premières gouttes de pluie se mettent à tomber, elles murmures POTSU POTSU, PARA PARA. Puis elles enchaînent, plus pressées, sur des SAA SAA. Si la pluie se fait plus douce, elle chuinte doucement SHITO SHITO. Puis fait SHOBO SHOBO. Enfin, quand elle déverse des torrents, elle mugit ZA ZA »
  • parfums et perceptions palpables nous parle d’arômes, de pluie sur la peau …

La pluie est également messagère des émotions. Solitude, mélancolie, tendresse, mais égament joie, passion et bien d’autres ! Ainsi le mot « sabishii » en japonais signifie triste, solitaire, et son idéogramme est fait de trois gouttes d’eau sur du bois. La pluie peut également renvoyer aux notions de Mono no aware (regret mélancolique d’une chose révolue) ou au Yugen, mystère profond des choses.

La pluie au royaume du mental permet d’évoquer ces pluies qui nous transportent hors du monde, nous invitent à la méditation. Observer la vie plutôt que réagir à elle. Reposer son âme, trouver le calme. Et pourquoi pas faire la sieste ou se glisser dans un futon après le bain. Le concept de Muga prend alors tout son sens. « Muga est un concept japonais zen qui repose sur l’idée du « rien ». Muga, c’est la « concentration en un point unique » qui n’est possible que lorsque plus rien ne s’oppose entre l’homme et l’action dans laquelle il s’est engagé. Le Muga advient quand la barrière entre le « soi » et l’action est tombée. C’est l’extase de certains moments où l’on se rend compte, après coup, que l’on a agi en pleine conscience : sans penser à soi, sans effort et sans un « moi » qui observe. »

Puis le lecteur arrive à La pluie au domanie de l’esprit. Il y est question de flottement entre deux mondes, de Mujo, l’art de flotter dans le temps. Les souvenirs affluent. Il est temps de rêver. Sentir la vie, son côté sacré, mystérieux, vivre l’émerveillement … faire l’expérience du Tao.

Dans une dernière partie, peut-être la plus « concrète » pour ceux qui chercheraient un guide pour vraiment apprécier la pluie, l’auteure nous donne des idées pour profiter de la pluie : chez soi avec des repas et boissons de pluie, des décors aquatiques, des rituels (se laver les cheveux à l’eau de pluie, faire brûler de l’encens, regarder des films, écouter des musiques, lire des livres « de pluie », composer des haïkus, prendre des notes, apprendre l’aquarelle, écrire des lettres), ou à l’extérieur – que vous pourrez mettre en pratique après le confinement – (trouver un kiosque dans un parc, chercher des crapauds, passer un week-end en Angleterre ou en Irlande, marcher, prendre des photos de pluie).

Ce livre regorge de haïkus et autres textes magnifiques qui rendent la lecture délicieuse et allègent un peu le quotidien étrange de ces jours-ci.

Les 100 objets du Japon de Julien Giry et Aurélie Roperch : découvrir le Japon par ses objets traditionnels ou modernes

Après nous avoir offert un superbe voyage en cent vues à travers le Japon (Les 100 vues du Japon, autre très beau livre aux textes et photographies merveilleux), Julien et Aurélie invitent cette fois le curieux, collectionneur, voyageur ou futur voyageur à découvrir ou redécouvrir les objets japonais.

100 objets, c’est à la fois peu et beaucoup pour un pays. Cela permet de découvrir les objets traditionnels (kokeshi, masque, pierre à encre et autres objets issus du riche artisanat), mais également des choses beaucoup plus modernes (on pense naturellement aux toilettes, aux jeux vidéo, aux distributeurs de boissons – dans le top 10 pour mon fils ! -, aux cups noodles, aux poussettes à chien, et tellement d’autres choses surprenantes qui étonnent et émerveillent lors d’un premier voyage dans ce pays).

Feuilleter ce livre est un plaisir toujours renouvelé. C’est reconnaître des objets croisés en voyage et y repenser avec nostalgie, c’est noter un objet qu’on n’a pas vu et que l’on ne veut pas oublier lors du prochain voyage, c’est apprendre plein de choses sur tous ceux qui sont présentés : origine, fabrication, signification, lieu où le trouver, façon de s’en servir.

La présentation est très intéressante : le nom en japonais, une ou deux photos, le nom en français avec un court texte en rouge pour aller à l’essentiel, puis dans la deuxième moitié de la page, un texte qui retrace l’histoire de l’objet, sa présence géographique, son usage au fil du temps … des textes toujours passionnants, précis, documentés, et très bien écrits (une plume très belle que j’avais déjà beaucoup appréciée dans leur précédent livre). Et chaque fois que c’est possible, les auteurs livrent des informations plus pratiques pour pouvoir découvrir ces objets par soi-même (dans quelles villes, quartiers les trouver, avec des échelles de prix, voire des sites internet et des adresses françaises pour ceux qui n’ont pas la chance de pouvoir se rendre au Japon).

Le choix des objets a été fait en collaboration avec Aya Ozu (japonaise, qui avait fait la même démarche avec 50 objets français dans son livre La Chambre de Sophie la Parisienne). Les échanges ont permis d’ajuster les choix, de les expliquer, de comprendre ce qui fascinait parfois de façon surprenante et d’arriver ainsi à une liste de 100 objets.

Le classement a été pensé pour emmener le lecteur en voyage dans le Japon du quotidien (dans la rue, dans la maison, avec un zoom dans la cuisine, autour de l’habillement, des gourmandises), des saisons, des arts et artisanats, des souvenirs de voyage. En fonction de ses centres d’intérêt, chacun peut ainsi se rendre dans l’univers qui l’attire le plus … ou se laisser entraîner au fil des pages dans la découverte d’un pays fascinant !

Un livre indispensable pour tous les curieux ! A compléter par les 100 vues du Japon pour découvrir des paysages urbains et ruraux et ainsi avoir sous les yeux les multiples facettes du pays.

Vous pouvez commander les deux livres sur leur site !

La terre est une marmite de Ryoko Sekiguchi : mets et mots pour petits gourmands

Gilberte Tsaï organise depuis plusieurs années des petites conférences destinées aux enfants de plus de dix ans. Le but est d’éclairer, d’éveiller, sur des sujets aussi divers que l’infini, la poésie, l’émotion, les arbres, les odeurs, la couleur du ciel etc. La personnalité qui intervient doit se mettre à hauteur d’enfant et expliquer simplement mais pas de façon simpliste le sujet qui la passionne.

Ryoko Sekiguchi s’est brillamment prêtée au jeu et, grâce à la publication des textes de ces conférences dans de très beaux receuils par les éditions Bayard, le lecteur jeune ou moins jeune qui n’a pas eu la chance d’y assister peut déguster les mots qu’elle a dits pour parler cuisine, goût, et bien plus encore !

Comme à son habitude, en parlant de goûts et de mets, elle abord bien d’autres sujets. Le jeune lecteur se prend vite au jeu et se pose mille questions.

Elle se présente d’abord comme un écrivain, à savoir quelqu’un qui pose des questions. Entre un grand-père éditeur et une mère qui dirige une école de cuisine, Ryoko a très vite étudié et mêlé les deux. Les plats ont des noms, les recettes de cuisine sont des textes. Jusque là tout va bien … mais comment mettre ce que l’on ressent par les cinq sens sous forme de mots ? Un goût est toujours personnel et rempli d’émotion, mais pas facile de dire quel goût a une courgette ou un gâteau au chocolat (on est vite limité pour le décrire : amer, sucré, herbeux …) ? Et que dire des plats étrangers que l’on découvre et dont la saveur ne nous rappelle rien de connu ? (J’ai fait cette étrange expérience la première fois que j’ai bu du saké : à quoi se raccrocher, aucune boisson, alcoolisée ou non, ne me venait à l’esprit pour définir, identifier, expliquer ce goût … j’étais peut-être plus à l’aise pour trouver des senteurs à ce breuvage, mais en bouche c’était juste troublant). Pour Ryoko, c’était l’huile d’olive qu’elle n’a pas aimé la première fois qu’elle l’a sentie à treize ans, « une odeur de crayon » !

Tout au long de la conférence, elle questionne les enfants, stimule leur curiosité, les invite à s’ouvrir aux cuisines comme à des langues d’autres pays. Ne pas juger avec son palais déjà formé voire formaté, mais apprendre. Créer son propre territoire du goût, se libérer de son cadre familial, sentir, toucher, croquer … Car manger c’est être en échange, avec les autres, avec son environnement. C’est découvrir en permanence. D’ailleurs quel goût aura un plat du futur que nous n’avons jamais mangé ? Peut-on manger les nuages ?

Une invitation à la découverte, à la rencontre, au partage ! Un livre à lire en famille pour échanger, discuter … et ensuite aller goûter le monde !